mercredi 29 avril 2020

A propos de Thierry Marignac

MARIGNAC Thierry
Romancier post-national d’expression française et traducteur (Paris, 1958).

Le dernier roman de TM, L'Icône, est disponible aux éditions L'Arène


A tout seigneur, tout honneur. Puisque c'est chez lui que nous avons piqué l'expression de "dadaïsme spontané des broyeurs de formes". Expression elle-même plus Dada que Dada.



En 1954 Félicien Marceau déclarait : "Dans tout raisonnement sur le roman contemporain, il y a un os. Cet os s’appelle Simenon." Si on continue de creuser, on ne tombe plus sur un os mais sur un bâton de dynamite qui s'appelle Thierry Marignac.

Qu’est-ce qui fait que Marignac est considéré comme un marginal (ou un excentrique, voire plutôt un infréquentable) dans les lettres françaises ? son refus punk de se justifier après la provo de son premier roman, Fasciste ? son amitié - type de relation qui est désormais un pièce à conviction incriminante dans le tribunal de la pensée contemporaine - avec Edouard Limonov ? son intérêt suspect - à une époque où pourtant on fait du refus de l’ethnocentrisme un axiome - pour la Russie, l’Ukraine et les ghettos noirs de Brooklyn ? ou encore, un trop grand professionnalisme en littérature ? Considérer la littérature comme la plus belle entreprise qui soit mais, en même temps, "réduire" le roman à un drame de mots, refuser d’en faire un dazibao, chercher à toucher à l’émotion, à la sensibilité, à la beauté. Ce qu'il fait avec infiniment plus de talent que n’importe quel gratte papier contemporain. Voilà certainement la plus belle provo qu’il pouvait faire.

Condamné également à cause de son audace pour ses passions ? Peut-être. À une époque où la faiblesse, l’invalidité, l’impuissance créatrice et la médiocrité sont devenus des valeurs cardinales, un écrivain qui fait preuve de bonne santé, de vivacité, de virilité et de courage personnel, c’est suspect. Il ne serait pas de droite ton auteur, par hasard ? C’est vrai qu’il a les cheveux courts et qu’il sait boxer, m’enfin. Qu’aurait-on pensé de Malraux, Drieu la Rochelle, Cendrars ou de Roux s’ils publiaient leur premier roman de nos jours ?

Audace pour ses passions, oui ! Contrairement aux écrivains tendance Télérama comme Figaro Littéraire, Marignac ne reste pas vraiment le cul vissé sur sa chaise de bureau à attendre l’inspiration. Non seulement, il se pourrait qu’elle ne vienne pas, disait Tolstoï, mais surtout, à défaut de donner dans le nombrilisme, c’est à l’extérieur qu’on trouve de quoi écrire. Quand on lui offre un travail de traducteur, il va chercher ses auteurs dans le Time Square pre-Giuliani. Quand il commence à s’ennuyer de l’anglo-américain, il s’inscrit aux Langues O’ et va trouver des Russes. En même temps, il décide de plonger dans les profondeurs de l’Ukraine pour en sortir une longue enquête sur les camés et la narcomafia.

Une fois mis de côté la légende du type "sévère, terrible et sans tendresse", reste surtout (et principalement) une oeuvre d'un grande sensibilité, remplie de décrochages poétiques, qui jette un jour sans égal sur notre monde. Une oeuvre réellement artistique : "Tout art véritablement vivant sera irrationnel, primitif et complexe. Il utilisera un langage secret et léguera non pas des documents édifiants, mais des documents paradoxaux" (Hugo Ball, La Fuite hors du temps). P
lus Dada que Dada on vous dit !

Laissez tomber le Canada Dry and get the real stuff ! Lisez Marignac : https://antifixion.blogspot.com


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